EXPLOIT
AU "COMMUNALE"
Là-dessus,
était tombée la terrible nouvelle en provenance de
ZURICH : BASTIA allait devoir se frotter à TORINO au 3èrne
tour de l'épreuve. TORINO, l'équipe-reine du calcio
des années 70 avec sa " cousine-ennemie " la JUVENTUS.
Le TORO constellé " d'azzuri " renommés
: GRAZIANI, PULICI, SALA, CASTELLINI, ZACCARELLI, PECCI... Et comme
toujours - on en prenait l'habitude - c'étaient les Bleus
de CORSE qui auraient le désavantage de recevoir les premiers...
" Sta volta semu fritti ! ", pensèrent beaucoup
de supporters bastiais qui savaient à quoi s'en tenir sur
le grand club piémontais alors à son apogée
sous la conduite éclairée de Gigi RADICE, l'ex-compagnon
" milanista " et l'alter-égo de TRAPATTONI.
Mais déjà, ce Bastia-Europe paradoxal et déconcertant,
ce S.E.C.B. bousculant les traditions et n'arrétant pas de
faire des pieds de nez à la logique se trouvait dans des
dispositions d'esprit telles que de surprises en particularismes,
il était parti pour d'autres conquêtes aux yeux de
l'Europe sidérée...
Désavantage, la seconde manche sur le terrain adverse ? Allons
donc, pas pour une équipe pareille qui se moquait pas mal
des données établies ! Et l'on recommença donc,
comme à l'ordinaire, le 23 Novembre, avec un premier but
visiteur (signé PULICI) à FURIANI... Qu'importait
! A la fin du match, c'était encore une fois le S.E.C.B.,
grace à PAPI et à REP, qui gardait l'avantage (2-1)
pour la plus grande joie des supporters qui fêtèrent
ce 5ème succès consécutif par une bronca de
tous les diables.
Est-il besoin de le rappeler, cette légitime liesse populaire
n'était rien comparée au formidable tonnerre d'enthousiasme
qui devait abasourdir TURIN, la FRANCE et l'EUROPE au soir du 7
décembre 1977, aujourd'hui comme hier une date unique, exceptionnelle,
inoubliable pour notre sport insulaire tout enter. En aura-t-on
parlé de cette épopée turinoise qui malgré
la neige et la température polaire, réchauffa quelques
15 000 coeurs corses accourus de l'ile et de tout l'hexagone. Quelle
soirée ! Jamais sans doute le Stadio Communale, emmitouflé
dans son manteau blanc (mais le terrain, lui, avait été
préservé des intempéries) n'avait vécu
une ambiance aussi singulière. Ambiance pour ainsi dire "
à l'usu corsu " avec ces milliers d'envahisseurs brandissant
fièrement " a testa di Moru " sous les regards
ébahis des tifosi...
C'est dans ce temple du calcio " corsisé " pour
un soir et aujourd'hui réformé (TURIN ayant maintenant
le Stado delle Alpi, enfanté par le Mondiale italien de 1990)
que BASTIA toucha au zénith de sa gloire :
- D'abord en réussissant un premier but d'anthologie par
l'entremise de LARIOS en conclusion d'un lumineux mouvement collectif.
But fabuleux et 1-0 au bout de vingt minutes ! On croyait rêver,
car encore une fois, " CAHU " avait sut remanier son équipe,
incorporant entre autres un nouveau venu, le jeune marocain Merry
ABDELKRIM, alias KRIMAU...
-Ensuite en renversant magistralement une situation qui paraissait
désespérée après que 'Ciccio' GRAZIANI,
épaulé par son compère de première ligne
PULICI (on les appelait "gemmelli", les jumeaux) eut réussi
coup sur coup deux buts-assomoirs.
Mais KRIMAU était précisément là qui,
tel DE ZERBI à NEWCASTLE, s'en alla égaliser sans
le moindre complexe à la suite d'une action-commando conduite
pour ainsi dire la " vindetta entre les dents " par CAZES,
après quoi notre marocain doubla la mise au terme d'une admirable
course solitaire ! Et tandis qu'au tableau lumineux apparaissait
une deuxième fois le nom de "ABDELKRIM", KRIMAU,
ivre de joie, venait s'agenouiller devant les supporters corses
quant à eux délirants de bonheur...
A son tour, le marocain venait de symboliser cet incontournable
esprit de conquête qui faisait que tous les joueurs bastiais,
titulaires ou réservistes, corses ou non, se fondaient dans
un même moule, formaient un bloc sans failles, communiant
dans la même foi.
3 à 2 dans l'antre du TORO et par dessus le marché
une sixième victoire de suite pour la bande à CAHUZAC
! Pas même le rude hiver du Nord-Italia qui les obligea à
galérer sur le chemin du retour ne put altérer ce
grand moment d'histoire pour 15.000 corses enchantés.
Et puis n'était-il pas vrai, comme l'avait souligné
la presse Italienne, que le succès bastiais "était
aussi remarquable par la maitrise collective et par le fond de jeu
que par les qualités de corps et d'esprit ? "
" Si nous posons tant de problèmes à nos adversaires
et notamment chez eux, çà doit être aussi parce
que nous n'avons pas que l'enthousiasme et la volonté, ne
croyez-vous pas ? " observait avec juste raison Pierre CAHUZAC
après avoir déclaré dans un premier temps :
" Ce coup là, pour sur, on peut parler d'exploit ! "
L'hiver venu (et avec lui la rituelle trêve de trois mois),
les bastiais pouvaient légitimement s'estimer comblés.
Outre qu'ils étaient qualifiés pour les quarts de
finale et qu'ils avaient dorénavant toute la Corse derrière
eux, ils venaient de révéler à l'Europe interdite
une équipe formidable et une petite île à l'âme
magnifique, à l'identité bien trempée.
le 23-11-77 à Bastia :
BASTIA - TORINO : 2-1 (mi-temps 1-1) 9 743 Spect.
Buts pour BASTIA : PAPI 37e, REP 62e ;
Pour TORINO : PULICI 22e.
06-12-77
à Turin :
TORINO - BASTIA : 2-3 (mi-temps 1-1) 70 000 Spect.
Buts pour BASTIA : LARIOS 20e, KRIMAU 51e et 65e ;
Pour TORINO :GRAZIANI 23e et 47e.
|